La Cour Européenne des Droits de l’Homme sous influence de George Soros ?
La Cour Européenne des Droits de l’Homme sous influence de George Soros ?
par Gregor Puppinck
Transcription de l’entretien par « Des Livres et Nous »
Entretien par VA Plus le 2 mai 2021
« L’idéologie derrière l’Open Society, je crois qu’on la connaît tous un peu, c’est l’idée que la liberté est fille du chaos. La liberté serait le résultat de l’absence d’entraves. Le fait que je suis Français est constitutif de mon identité, mais cela peut aussi être considéré comme une entrave à ma liberté. George Soros était un financier qui a fait fortune en tirant profit des crises et du chaos. »
VA Plus : Bonjour Gregor Puppinck, vous êtes le directeur du Centre européen pour le droit et la justice et vous avez publié il y a un an presque jour pour jour un rapport intitulé Les ONG et les juges de la Cour européenne des droits de l’homme dans lequel vous révélez l’existence de graves conflits d’intérêts à la CEDH entre certains juges et des ONG qui sont liées aux réseaux de l’Open Society de George Soros. Nous allons donc faire aujourd’hui avec vous un état des lieux de la situation un an après la publication de ce rapport. Mais avant cela, nous allons essayer de rappeler ce qu’il y avait dans ce rapport, comment vous avez enquêté à l’époque et quelle était la conclusion de ce travail. Donc pour comprendre l’origine de cette enquête, est-ce que vous pouvez nous dire d’abord ce qu’est le Centre européen pour le droit et la justice dont vous êtes le directeur, quel est votre travail, votre rôle à la Cour européenne des droits de l’homme ?
Gregor Puppinck : Le Centre européen pour le droit et la justice est une petite organisation privée donc ONG également qui agit principalement auprès du Conseil de l’Europe dont dépend la Cour européenne des droits de l’homme et des Nations Unies à Genève dans le domaine des droits de l’homme. Nous sommes une organisation que l’on peut qualifier de conservatrice qui défend principalement le droit naturel, la liberté de conscience, la famille, la vie, la liberté religieuse, les chrétiens à travers le monde. Nous avons des organisations soeurs un peu partout dans le monde, aux Etats-Unis mais aussi au Pakistan où nous défendons les chrétiens persécutés ; à Jérusalem, en Afrique etc. Donc une ONG conservatrice qui travaille auprès des instances européennes et internationales dans le domaine des droits de l’homme.
Nous sommes intervenus et nous avons agi dans de nombreuses affaires à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) depuis maintenant plus de 20 ans, je n’ai pas compté mais dans peut-être au moins une cinquantaine si ce n’est une soixantaine d’affaires à la CEDH. Donc nous connaissons bien la CEDH, nous travaillons tous les jours sur des affaires de la CEDH. J’ai une bonne connaissance aussi d’un certain nombre de juges ou d’anciens juges de la CEDH, de ses présidents, anciens présidents. Nous avons cette activité un peu spécialisée qui participe au travail de ces instances.
VA Plus : Dans le cadre de ce travail vous fréquentez ces magistrats, vous êtes dans les couloirs de la CEDH et donc vous avez entendu – c’était cela à l’origine de cette enquête – parler de l’existence de juges Soros à Strasbourg. Tout d’abord vous n’y avez pas vraiment prêté attention. Comment vous êtes-vous rendu compte que le sujet méritait que quelqu’un s’y intéresse ?
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La jurisprudence de la CEDH évolue dans un sens
de plus en plus libéral ou même libertaire.
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Gregor Puppinck : J’ai commencé à travailler dans cet environnement avec beaucoup de respect pour la CEDH évidemment, comme tous les étudiants en droit, nous sommes élevés dans la quasi vénération de cette instance qui donne le la, qui indique la jurisprudence qui s’applique dans tous les pays européens. Et donc c’est avec attention que j’ai travaillé. Et progressivement, je me suis aperçu que la jurisprudence de la CEDH se décalait, évoluait dans un sens de plus en plus libéral ou même libertaire, qui se distingue fortement de la volonté initiale des rédacteurs de la Convention européenne des droits de l’homme. Ce glissement idéologique de la CEDH a attiré mon attention.
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J’expose dans mon livre la transformation idéologique
des Droits de l’homme depuis 20 ou 30 ans.
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VA Plus : Vous en avez tiré un livre.
Gregor Puppinck : J’en ai fait un livre, en effet, qui a pour titre Les Droits de l’homme dénaturé, qui a été publié fin 2018 par le Cerf et qui expose précisément toute cette transformation idéologique des droits de l’homme pendant les 20 à 30 dernières années, le très fort glissement, la très forte transformation idéologique. Sur la base de ce constat l’idée que les droits de l’homme sont comme embarqués dans une direction idéologique libertaire qui se constate aussi plus largement et plus généralement [dans la société]. Mon attention a progressivement été attirée non seulement sur les causes philosophiques et intellectuelles telles que cela apparaît dans mon livre, mais aussi les causes humaines. Et cela c’est la seconde étape de ce travail qui est de se demander pourquoi il se produit une telle dérive idéologique. Et là il faut naturellement s’intéresser aussi aux personnes. J’ai alors commencé à prêter attention à ce que certains amis qui travaillent à la CEDH me glissaient à l’oreille de temps en temps, à savoir l’existence problématique de « juges Soros » selon leur propre expression. J’ai commencé à creuser le sujet.
VA Plus : Il y a eu un élément déclencheur. Vous aviez donc observé tout ce glissement idéologique mais il y a eu l’affaire Vincent Lambert dans laquelle vous êtes intervenu auprès de la famille de Vincent Lambert et auprès des instances européennes. Pourriez-vous nous dire comment la CEDH a traité les recours qui ont été déposés par les parents de Vincent Lambert quand il était encore en vie ? Est-ce que cette attitude-là aussi vous a convaincu qu’il y avait un problème spécifique à la CEDH ?
Gregor Puppinck : Nous avons travaillé avec bonne foi, confiance auprès de cette institution dans plusieurs affaires et j’ai plusieurs fois – je dois le dire avec un peu d’amertume c’est vrai je le reconnais – été choqué par la façon dont des affaires importantes ont été traitées. Pourquoi ? Parce qu’elles ne vont pas dans le sens idéologique progressiste ou libéral. Dans une affaire comme celle de Vincent Lambert, il était condamné d’avance pour la simple raison que, au plan politique et idéologique, il était impossible, inconcevable que la CEDH condamne les lois françaises sur la fin de vie, l’euthanasie. Donc il y a un présupposé – je le crois vraiment, je l’ai observé et cela m’a été confirmé par des personnes de la Cour, pour ces affaires-là, très idéologiques, il y a un présupposé qui existe.
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Les requêtes sont traitées différemment
selon qu’elles servent ou non les idées « progressistes ».
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Le fait que la famille Lambert soit catholique traditionaliste n’a pas joué non plus en leur faveur. Donc il y a ce genre de problème, mais d’autres affaires également, je pourrais en citer de nombreuses, qui manifestement ont été traitées de façon très rapide, voire envoyées à la poubelle. J’ai donc vu des différences de traitement selon le sujet dans les requêtes introduites à la Cour, selon que la requête finalement serve ou non le progressisme et une vision de l’évolution des droits de l’homme. Et cela m’a montré à quel point il peut être parfois finalement quelque peu stérile de vouloir se battre sur telle ou telle affaire, lorsqu’il apparaît qu’il existe un problème plus systémique de parti-pris.
VA Plus : Justement pour comprendre ce problème systémique, pour comprendre comment le réseau de l’Open Society a pu infiltrer – c’est le mot qu’on a utilisé à l’époque dans l’hebdomadaire Valeurs Actuelles quand on a parlé de votre rapport – la plus haute juridiction européenne. Il faut d’abord comprendre comment fonctionne cette juridiction. Ce n’est pas forcément très facile. Pourriez-vous nous expliquer le plus simplement possible comment fonctionne la CEDH, et notamment comment sont sélectionnés ses juges.
Gregor Puppinck : Notre rapport ne concerne pas uniquement l’Open Society, il concerne toutes les ONG en général. Mais il nous est apparu après qu’en effet c’est l’Open Society qui est prédominante.
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Comment les juges sont sélectionnés par la CEDH
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Concernant le fonctionnement de la CEDH : il y a un juge par Etat, donc 47 juges. Chaque juge a le même pouvoir, chaque juge vote, donc le vote de chaque juge est égal, le vote du juge albanais a autant de poids que celui du juge français ou allemand, au moins en pratique.
Comment sont-ils désignés ? Ils sont élus pour neuf ans, chaque Etat, donc chaque gouvernement propose trois candidats qui sont soumis à l’appréciation d’un petit groupe d’experts qui regardent si les trois candidats sont satisfaisants a priori. Puis c’est l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe qui va choisir parmi ces candidats celui qui va siéger à la Cour. Donc il y a proposition gouvernementale et élection par l’assemblée du Conseil de l’Europe, sur la base de trois candidats.
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Pourquoi les ONG ont-elles pris un tel poids
dans le fonctionnement des instances internationales ?
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VA Plus : Vous expliquez que, historiquement, on a souvent recruté les juges de la CEDH dans les spécialistes juridiques qui travaillent pour les ONG. Pourriez-vous nous expliquer pourquoi ? Et plus généralement pourquoi les ONG ont-elles pris un tel poids dans le fonctionnement des instances internationales ?
Gregor Puppinck : Les instances internationales sont une création principalement d’après-guerre et cela crée toute une couche supranationale d’institutions. Ce sont des institutions qui sont éloignées de la réalité nationale, qui sont même un peu hors-sol. Ces institutions n’ont pas de relations directes avec la vie sociale du pays, puisque leurs interlocuteurs naturels sont les Etats, les gouvernements, qui ont tous un intérêt à défendre.
Si bien que dans cet espace entre le niveau des Etats, le niveau des populations et le niveau international supranational, cet espace qui était plus ou moins vide a été comblé par des acteurs qu’on peut qualifier d’internationaux et qui se prétendent, qui se veulent « non gouvernementaux » et privés. Il y a cet ensemble de corps intermédiaires entre les Etats et les instances internationales qui sont principalement des fondations, des ONG, des intérêts privés mais aussi parfois des intérêts commerciaux et qui agissent auprès des instances internationales.
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De nombreux recours sont introduits
par Amnesty International,
l’Open Society ou les comités Helsinki auprès de la CEDH.
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Il faut bien comprendre que ce sont les instances internationales qui génèrent fortement cette présence de corps intermédiaires, d’organisations non gouvernementales. Et ces organisations donnent des informations et servent de société civile entre guillemets à ces instances internationales. Elles vont introduire des recours. Par exemple la CEDH a de nombreux recours introduits par Amnesty International ou l’Open Society ou les comités Helsinki. Et puis pour les instances internationales qui sont hors-sol, qui n’ont pas de bras, pas de jambes, qui sont aveugles, ces ONG servent aussi de sources d’informations.
Et donc il y a une interaction, une complémentarité. Le problème de la complémentarité entre acteurs privés et l’acteur public c’est qu’un équilibre doit être conservé entre les deux. Or ce que l’on observe aujourd’hui c’est que les acteurs privés, en raison de leurs financements, prennent de plus en plus de poids et finissent même, de mon point de vue, par être plus puissants que l’instance publique intergouvernementale qu’elles sont censées servir.
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L’Open Society en Europe a un plus gros budget que la CEDH.
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Il se produit donc un renversement dans les équilibres des pouvoirs entre les ONG et fondations privées et les instances internationales, à tel point que par exemple City, l’Open Society pour l’Europe a un plus gros budget que la CEDH. On voit donc bien là comment s’opère ce changement de pouvoir. La conséquence est que les ONG non seulement exercent une influence qui contribue au travail des instances internationales, mais pour ce qui concerne la CEDH, elles vont aussi essayer de placer certains de leurs collaborateurs comme juges.
VA Plus : Ce que vous décrivez serait moins grave s’il n’y avait pas certaines ONG qui étaient sur-représentées dans les juges qui sont présents à la CEDH. Et c’est là que l’on arrive au coeur du sujet. Pouvez-vous nous dire quelle méthode vous avez choisi pour vérifier d’où viennent les juges qui sont à la CEDH ? Et quel a été le résultat de votre enquête ?
Gregor Puppinck : Après que l’un ou l’autre ami m’ait signifié la présence de juges Soros, j’ai commencé à regarder les cv des candidats à la Cour et j’ai observé qu’en effet, c’était confirmé qu’il y avait de plus en plus de candidats aux fonctions de juges qui étaient issus de l’Open Society ou d’ONG affiliées. J’avoue que pendant quelque temps je n’ai pas osé attaquer ce sujet parce que… par peur je dois dire. Quand on parle de Soros, tout le monde se crispe. On n’ose pas en parler, on n’ose pas trop regarder…
Après l’affaire Lambert et une certaine amertume, je me suis dit le problème est plus grave, il faut chercher plus loin. Et là nous avons avec mon bureau regardé de façon méthodique sur dix ans les CV de tous les juges. Il y a eu 100 juges qui ont été en fonction à la CEDH et nous avons regardé tous les curriculum tels qu’ils sont publics, donc les éléments uniquement publiés. On n’a pas été déçus, on a été de surprise en surprise et il est apparu en fait que c’est considérable.
La méthode de recherche, ce que nous avons regardé : nous avons commencé à partir des principales ONG, mais le critère distinctif c’est que nous avons regardé les juges qui sont issus d’ONG actives à la Cour. Parce que beaucoup de juges évidemment font partie d’organisations diverses et variées. Mais là où un problème se pose, c’est lorsque vous êtes directement issu d’une organisation qui fait du lobbying à la CEDH, donc quand vous passez d’avocat ou de militant ou de lobbyiste à la fonction de juge.
VA Plus : C’est comme si vous-mêmes vous deveniez juge.
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Sur 100 juges de la CEDH, 22 ont exercé des responsabilités
importantes comme collaborateurs ou fondateurs
et directeurs d’ONG
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Gregor Puppinck : C’est comme si moi ou mes collaborateurs demain devenaient juges à la CEDH et qu’ensuite nous soyons amenés à juger des affaires que nous-mêmes introduisons. Ce serait franchement problématique. C’était le critère que nous avons observé, que sur les 100 juges des dix dernières années, 22 ont exercé des responsabilités importantes comme collaborateurs ou même comme fondateurs et directeurs d’organisations actives à la CEDH. Alors il s’agit principalement des organisations comme Open Society ou Amnesty International ou le Comité Helsinki. Ce sont toujours des organisations qui sont bien connues, les principales organisations sur la scène des droits de l’homme et qui sont toutes finalement assez proches sur le plan idéologique.
VA Plus : Vous citez le chiffre de 22 juges, en fait vous avez pris l’approche la plus basse possible pour être sûr d’avoir le chiffre le plus solide possible. Mais si on prenait en compte les liens indirects, le chiffre serait probablement beaucoup plus important puisque l’Open Society finance des centaines d’organisations, donc on pourrait faire monter ce chiffre si on le souhaitait. Sur le site de l’OSF on lit que toutes les organisations financées par l’Open Society s’engagent à partager je cite « les objectifs stratégiques du programme de l’Open Society ». C’est là où ça pose un problème parce que l’on voit bien que toutes ces ONG actives partagent le même objectif idéologique. Comment pourrait-on résumer ces objectifs et l’idéologie de George Soros qui pénètre de plus en plus la CEDH ?
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Sur les 22 juges que nous avons identifiés,
12 viennent de l’Open Society.
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Gregor Puppinck : Sur les 22 juges que nous avons identifiés, il y en a 12 qui viennent de l’Open Society, donc c’est considérable. Et 7 ONG, dont l’Open Society, et les 6 autres organisations sont financées par l’Open Society. On voit donc bien l’emprise particulière de cette organisation. Ce n’était pas pour nous un présupposé dans la recherche, c’était le résultat de la recherche. Voilà ce constat de la prédominance d’une organisation en particulier parmi ces juges. Et on aurait pu en avoir davantage. Certains, nous ne les avons pas mis dans la liste parce qu’ils n’ont pas eu de fonction permanente au sein des organisations.
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Idéologie de l’Open Society
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Concernant la question de l’idéologie de l’Open Society je crois qu’on la connaît un petit peu tous. C’est une idéologie ultralibérale ou libertaire à laquelle nous sommes confrontés. C’est cette idée que la liberté est fille du chaos. La liberté serait le résultat de l’absence d’entraves, de l’absence de tout paramètre donné, qu’il soit historique, identitaire, physique, culturel. Cette idée que le chaos est la condition même de la liberté est une idée peut-être issue de la finance. On sait que Soros était un financier, il a fait fortune en particulier en tirant profit des crises et du chaos. Je crois que l’idée c’est : tout ce qui entrave notre liberté doit être supprimé.
Or le problème c’est que ce qui est considéré comme des entraves à nos libertés est en fait bien souvent constitutif de notre identité. Le fait que je suis Français est bien constitutif de mon identité. Mais cela peut aussi être considéré comme une entrave à ma liberté d’être citoyen de notre pays ou d’être citoyen européen ou du monde, le fait que je sois un homme pour certains, que l’on soit sexué, peut être une entrave. Et c’est donc toute cette idée de libérer l’homme en supprimant également certains héritages.
Cela peut expliquer l’action de cette organisation et d’autres organisations qui lui sont liées, à toujours vouloir étendre la liberté par la suppression des éléments qui nous constituent. C’est aussi le plaidoyer en faveur de la libéralisation des drogues ou de la libéralisation de la pornographie ou de la prostitution. Donc il y à cette vision très libertaire aussi de la liberté qui est en fait destructrice pour la société.
VA Plus : C’est important de comprendre aussi, pour saisir quelles sont les conséquences de ce que vous avez découvert sur la CEDH, quel est le pouvoir d’un juge européen ? Dans le dossier que nous avons publié, vous disiez : « Le pouvoir d’un juge européen est sans commune mesure avec celui d’un juge national. » Est-ce que vous pouvez nous expliquer pourquoi ?
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Les juges de la CEDH pour la plupart
ne sont pas des magistrats professionnels.
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Gregor Puppinck : D’abord parce que les juges de la CEDH, qui pour la plupart ne sont pas des magistrats professionnels, ces juges ont le pouvoir de juger la loi et même la constitution des Etats membres du Conseil de l’Europe. Ils peuvent condamner un pays et l’obliger à changer sa constitution. Et leur décision s’applique non seulement au pays condamné, mais à l’ensemble des Etats membres du Conseil de l’Europe. C’est donc vraiment un pouvoir considérable. La CEDH se qualifie elle-même de « conscience de l’Europe ».
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Les juges de la CEDH ont le pouvoir
de juger la loi et même la constitution des Etats.
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Ensuite ce qu’il faut voir c’est que la CEDH ne fait pas seulement du droit, elle ne traite pas seulement de questions de justice mais beaucoup aussi de questions de morale. Une juridiction normale, son rôle est de rendre à chacun ce qui lui est dû ; de traiter les différends. Mais la CEDH elle, va porter des jugements de fond sur des questions morales, par exemple : qu’est ce que la famille ; qu’est-ce que l’Etat ; est-ce que l’euthanasie est acceptable. L’euthanasie n’est pas une question de justice, c’est une question de morale. Ou sur l’avortement. Lorsque la cour condamne quasiment l’Irlande à légaliser l’avortement, ce n’est pas une question de justice c’est une question morale. C’est une instance qui a raison de se qualifier de conscience de l’Europe parce qu’elle prend des jugements en termes de moralité et aussi de droit. Et son pouvoir est considérable parce qu’il s’impose à tous les Etats.
La CEDH est cette instance qui est censée garantir le respect de la dignité humaine, des droits, des libertés, de la démocratie. Elle a été fondée après guerre pour cela, pour empêcher toute forme de totalitarisme ou d’excès de pouvoir des Etats. Mais aujourd’hui ce que l’on observe c’est que cette instance elle-même est devenue une source de pouvoir considérable. On dit souvent que la solution à un problème devient tôt ou tard un nouveau problème. On peut dire que la Cour elle-même aujourd’hui, comme rien ne la limite, et comme elle prétend répondre également à des questions d’ordre moral, dispose d’un pouvoir qui je crois on peut le dire est sans commune mesure avec aucune institution dans l’histoire.
Par exemple on peut dire par rapport à la religion, on pourrait même dire par rapport à l’église catholique, que la CEDH a plus de pouvoir que n’en a eu l’église catholique autrefois. Jamais l’église catholique n’a prétendu avoir le pouvoir de changer la morale. Et on pouvait ne pas être d’accord avec un dogme. Alors que les droits de l’homme sont des décisions de justice qui s’imposent. Vous n’êtes pas libre de dire que vous n’êtes pas d’accord avec telle décision puisque c’est une décision d’ordre juridique qui s’impose. Donc les décisions morales prises par ces instances internationales s’imposent à toute personne, c’est donc un pouvoir qui est considérable.
VA Plus : Par rapport à ce que vous expliquez, il y a souvent quelque chose qui revient dans les médias quand on reproche à une instance supra-nationale d’imposer quelque chose à un gouvernement – je pense par exemple au moment de la signature du pacte de Marrakech où on entendait souvent dire « les décisions ne sont pas contraignantes », donc ça ne sert à rien de s’énerver parce que il n’y a aucune obligation pour les pays. Il y a une une confusion entre la notion de contrainte et la notion d’obligation. Est-ce que vous pouvez expliquer jusqu’à quel point les Etats peuvent décider de ne pas tenir compte de ce que leur dit de faire la CDH ?
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Certains Etats refusent de plus en plus
d’appliquer les décisions de la CEDH.
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Gregor Puppinck : Les Etats se sont engagés à respecter les décisions de la CEDH, donc pour cela la Cour européenne prend des décisions dont le respect est obligatoire. Pour autant que les Etats respectent leur parole. S’ils ne le font pas, ils seront soumis à la pression du système et des autres Etats membres pendant de nombreuses années. Les Etats ont quasiment toujours respecté les décisions de la Cour. Depuis maintenant quelques années, l’on observe toutefois un fléchissement et certains Etats refusent de plus en plus d’appliquer. C’est sûr que si les Etats refusent d’exécuter les arrêts, c’est quand même une fragilisation importante du système.
En droit international tout repose finalement sur le respect de la parole donnée. Il est sûr que la Cour européenne [la CEDH] n’a pas une armée, une police à sa disposition, donc elle peut condamner et pour elle ce qui est essentiel c’est le respect de ce qu’on appelle l’Etat de droit, à savoir que les décisions de la CEDH soient bien appliquées. Si elles ne sont pas appliqués, le système juridique même national va se faire l’allié de la CEDH pour obliger les gouvernements nationaux à les respecter. Il faut que toutes les juridictions nationales et internationales soient liées entre elles et se respectent mutuellement, respectent la hiérarchie des instances judiciaires, pour contraindre le gouvernement. Et c’est là effectivement que repose l’essentiel.
En revanche il existe d’autres textes internationaux qui ne sont pas contraignants : de nombreuses résolutions par exemple des Nations Unies ou du Conseil de l’Europe qui sont différents, qui n’ont pas la nature d’une décision de justice comme celle de la CEDH.
VA Plus : A ce stade de votre enquête, vous avez déterminé la part de juges issus d’ONG qui opèrent auprès de la CEDH qui sont devenus juges de la CEDH. Il y en a 22. Pourquoi parlez-vous de conflits d’intérêts ? Qu’avez-vous découvert comme conflit d’intérêts ?
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Conflits d’intérêts à la CEDH
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Gregor Puppinck : Après avoir observé que 22 juges sont issus d’ONG actives à la Cour, nous avons poussé la recherche un peu plus loin pour voir comment ils ont agi lorsqu’ils étaient éventuellement confrontés à des requêtes introduites par leur propre ONG. C’est un second volet de notre enquête. Dans un tel cas il y a de façon évidente un conflit d’intérêts. N’importe quel juge vous le dirait, il est évident qu’un juge ne peut pas siéger, ne peut pas connaître une affaire dans laquelle il a une relation privilégiée avec une des parties. Il a normalement l’obligation de se retirer de l’affaire. Nous avons donc simplement regardé si cette obligation était respectée. Nous avons été fortement surpris de voir que ce n’est pas le cas.
Pendant les dix années entre 2009 et 2019 nous avons trouvé 88 cas, c’est quand même énorme, dans lesquels au moins un juge a jugé une affaire introduite ou soutenue par une ONG dont il a été le responsable, le collaborateur ou le dirigeant dans les années qui ont précédé. Ce sont des cas manifestes de conflit d’intérêts très nombreux qui ont été exposés et qui restent à ce jour sans réponse. On attend que la CEDH prenne des mesures pour corriger cela.
VA Plus : Comment la Cour a-t-elle réagi ? Est-ce que vous pouvez nous citer une affaire qui serait symptomatique de tous ces dysfonctionnements que vous avez découverts ?
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Cas du juge bulgare
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Gregor Puppinck : Oui il y en a beaucoup. L’une d’entre elles par exemple : on a beaucoup parlé du juge bulgare parce qu’il est vraiment exemplaire entre guillemets d’un militant. C’est un Bulgare, la Bulgarie a intégré le Conseil de l’Europe, lui était militant, avocat, financé par l’Open Society, par les grandes fondations américaines, pour mener une action en Bulgarie. Il a fini par être recruté à New York par le Conseil directement pour toujours agir par le lobbying auprès des instances judiciaires, et il a fini par se faire élire, nommer à la CEDH dans des circonstances d’ailleurs qui ont été critiquées en Bulgarie même. Une fois juge à la Cour, il a accepté de juger des affaires introduites et représentées par l’ONG qu’il avait lui-même fondée. C’est un cas manifeste de conflit d’intérêts qui n’est pas acceptable pour un juge. Il y a beaucoup d’autres affaires. Ces affaires touchent un peu à tous les sujets. Souvent ce sont des questions de liberté d’expression, d’immigration, de droits des prisonniers, donc c’est assez divers, pour ça il n’y a pas de règle générale.
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Dans le rapport vous expliquez que ce que vous avez découvert
n’est vraisemblablement que la partie émergée de l’iceberg.
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VA Plus : Dans le rapport vous expliquez aussi que ce que vous avez découvert n’est vraisemblablement que la partie émergée de l’iceberg. Comment font les ONG pour couvrir leurs traces, pour faire disparaître leur implication dans certaines affaires et pour faire en sorte que dans tout ce qui est accessible publiquement, dans les bases de données publiques que vous avez utilisées, on ne perçoive qu’une minorité des affaires dans laquelle elles ont été impliquées ?
Gregor Puppinck : La Cour ne juge qu’une minorité des affaires qui sont introduites, ne juge que moins de 5% des affaires, donc il y a 95% des requêtes auxquelles on n’a pas accès puisqu’elles sont rejetés d’emblée. Donc celles-là déjà on les a mises de côté. Et dans les affaires jugées les ONG interviennent de différentes façons. Et là il y a un vrai problème et nous avons fait des recommandations à la Cour pour corriger cette situation. Bien souvent une ONG va soutenir, financer un recours, mais va se tenir en retrait et donc n’apparaîtra pas. Il y aura simplement un avocat, parfois de l’ONG ou parfois extérieur, et le requérant. Vu de l’extérieur cela semble être une affaire tout à fait ordinaire. Sauf que derrière il y a une grosse organisation qui a les moyens financiers et qui a aussi des relais politiques et médiatiques, et parfois même des relais jusqu’au sein de la Cour, pour s’assurer que le dossier avance. Dans une telle affaire, on ne peut pas voir l’implication d’une ONG.
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Il y a une absence de règles quant à la transparence
de l’action des ONG auprès de la CEDH.
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Il arrive aussi qu’une ONG agisse à la fois comme requérant, ou simplement comme tiers intervenant, ou les deux en même temps dans la même affaire. Donc il y a effectivement une absence de règles quant à la transparence de l’action des ONG au sein des requêtes qui est préjudiciable.
VA Plus : Maintenant que vous nous avez bien expliqué, résumé, même si c’était très rapide, le rapport, qui fait plus de 200 pages et qui est très dense et peut-être un peu complexe à saisir pour les personnes non spécialistes dont je fais partie, mais on va quand même essayer de faire le point de ce qui s’est passé un an après la publication de votre rapport. D’abord quelles ont été les réactions dans la société et le monde politique en France et aussi à l’étranger ? parce qu’il y a eu plus de réactions à l’étranger qu’en France.
Et deuxième question, est-ce que ces réactions ont été selon vous à la hauteur de la gravité de ce que vous avez découvert et rapporté dans cette enquête ?
Gregor Puppinck : Les réactions ont été considérables, il faut le dire, il y a eu des centaines d’articles dans le monde qui ont été publiés. En France bien sûr mais plus encore à l’étranger, en Europe, même en Amérique du sud, en Asie, en Afrique. Le contenu du rapport n’a pas été contesté. Je sais que beaucoup de personnes ont cherché la petite bête pour voir s’il y avait des erreurs. Non, aucune erreur n’a été notée, identifiée dans le rapport. Donc c’est un élément important, le rapport est là, il demeure avec les faits qui y sont révélés. Ensuite oui, des réactions parmi les juristes, beaucoup, des anciens juges de la Cour qui soutiennent le rapport, qui m’ont contacté pour m’encourager, des magistrats européens nationaux, le Conseil d’Etat de France, la juridiction suprême espagnole et autres qui de la même manière soutiennent et ont soutenu ce rapport et estiment qu’il est nécessaire, indispensable de le publier.
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Le ministre russe Lavrov
a demandé qu’il soit apporté des réponses
aux problèmes identifiés par notre rapport.
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Le monde politique alors là c’est plus différencié. Ce sont principalement des responsables politiques de droite, conservateurs, qui ont soutenu, repris le rapport, en France assez largement, mais aussi en Allemagne, aux Pays-Bas, en Espagne, Portugal, Bulgarie. La réaction la plus notable évidemment est celle du ministre russe des affaires étrangères monsieur Lavrov qui a fait un communiqué consacré au rapport et aux faits qui sont révélés dans ce rapport, en disant qu’il est nécessaire que le Conseil de l’Europe tienne compte sérieusement de ce rapport et apporte des réponses aux problèmes qui y sont identifiés. Donc des réactions politiques nombreuses.
Mais évidemment les partis politiques qui sont davantage dans la ligne idéologique des ONG visées sont restés silencieux ainsi qu’un certain nombre de responsables politiques qui n’ont pas forcément osé s’exposer parce que, il faut quand même le dire, c’est un sujet qui fait peur, et le pouvoir de l’Open Society et de ses organisations est considérable. Il n’est donc pas forcément facile de se mettre en travers de sa route.
VA Plus : Et la Cour [la CEDH] elle-même a-t-elle réagi au rapport ?
Gregor Puppinck : Tout ce qui se passe dans la Cour normalement est confidentiel, donc je ne suis pas censé le savoir et encore moins le dire. Toutefois oui il est évident – d’ailleurs ça a été dit dans le quotidien le Monde – ils étaient furieux de ce rapport. Ils ont pris la décision de ne pas répondre publiquement je pense parce qu’il n’y a pas d’élément erroné, tout est vrai. Et donc je n’ai pas été attaqué en justice pour ce que j’ai dit. Par contre par la suite la Cour a été interrogée par des ambassadeurs et par des parlementaires, et à chaque fois c’est le président de la CEDH qui a dû répondre, mais il a largement esquivé. Il a dit oui certes c’est vrai il y a bien des juges qui viennent d’ONG, mais ce n’est pas la faute de la Cour – ce qui est vrai – c’est le fait des Etats et de l’assemblée qui choisissent ces juges parmi les ONG – ce qui est vrai. Par contre il a totalement esquivé la question du conflit d’intérêts. Qui est la question centrale. Sur la question du conflit d’intérêt il n’y a pas de réponse et une volonté de le minorer et d’esquiver.
VA Plus : Depuis la mise au jour de ces pratiques est-ce qu’il y a eu un changement de comportement de la part des juges qui sont dans le cas de figure que vous avez décrit et des pratiques qui sont en cours à la CEDH ?
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La CEDH a été mise en cause
sur la protection accordée aux terroristes étrangers.
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Gregor Puppinck : Je pense que oui, il y a quand même un changement qui a lieu parce que la Cour est sensible à sa réputation, elle se rend compte bien sûr que sur de nombreux sujets elle est mise en cause. Elle a été fortement mise en cause sur, par exemple, la protection accordée aux terroristes étrangers qui ont trouvé asile en Europe grâce à la Cour et sur d’autres sujets. Elle est très sensible à sa réputation, d’où l’importance de rendre public ce genre de rapport parce que c’est finalement la seule façon d’avoir un effet durable.
On a regardé bien sûr ces derniers mois comment la Cour a jugé. Alors ce n’est pas encore significatif parce qu’on est encore trop près de la publication du rapport pour vraiment voir un effet dans la durée. Mais ce que l’on observe c’est qu’il y a encore des jugements qui ont été pris en situation de conflit d’intérêts. Sur environ 37 affaires identifiées dans lesquelles des ONG en cause interviennent ou agissent, il y a 17 cas nouveaux de conflit d’intérêts, ce qui est toujours important, mais en proportion légèrement moindre que les années précédentes.
Et il y a quatre juges liés à ces ONG qui ont été changés. Il y a donc un peu moins de juges liés aux ONG.
Un élément décisif sera l’élection prochaine du juge belge puisque la Belgique parmi les trois juges recommandés propose à l’élection une membre du conseil d’administration de l’Open Society. Là je crois que c’est un peu un test de voir si elle obtient des voix ou pas. En tout cas ce sera intéressant. Et je pense que maintenant au sein de l’assemblée qui élit les juges, ils sont sensibilisés à cette question.
VA Plus : Vous disiez tout à l’heure que vous aviez hésité à faire ce rapport dans un premier temps parce que vous aviez peur justement des conséquences que cela pourrait avoir. Est-ce que vous à titre personnel depuis un an vous avez observé un changement d’attitude à la CEDH, des juges, des gens que vous fréquentez, avec qui vous travaillez, par rapport à avant ?
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On a eu beaucoup de mises en garde
avant la publication du rapport.
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Gregor Puppinck : Oui bien sûr. En fait en publiant ce rapport on devient un peu un dissident c’est-à-dire que l’on est toujours dans le système, proche du système, mais quand même bien sûr il y a des changements importants, très importants. C’est un système, c’est un milieu. Il n’est pas bon de révéler le fonctionnement et les travers du milieu si l’on veut y être bien reçu. Donc oui pour nous ça a changé. On a eu beaucoup de mises en garde avant la publication du rapport, y compris sur la sécurité de notre bureau, sur la sécurité personnelle, physique. On nous a dit de protéger notre famille, protéger nos enfants. Il y a quand même eu une grande pression au moment de la publication de ce texte.
Je pense qu’il fallait le faire et nous n’avons fait finalement que montrer un aspect de ce phénomène plus général qui est l’influence grandissante de quelques fondations, de quelques organisations privées au sein du système de gouvernance supranationale. Cela c’est un phénomène majeur actuel du fonctionnement politique actuel. La réorganisation des réseaux de pouvoir, des réseaux d’influence au plan supranational et le poids majeur des acteurs privés. On a parlé par exemple du poids de la fondation Gates sur l’OMS, fondation qui est le tout premier financeur de l’OMS, ce qui est inconcevable. Le fait que des instances internationales inter-étatiques soient financées très largement par des acteurs privés n’est pas concevable.
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Le Conseil de l’Europe est financé par des acteurs privés.
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Nous avons aussi observé que le Conseil de l’Europe est aussi financé par des acteurs privés, que l’Open Society et la fondation Microsoft sont les principaux financeurs privés du Conseil de l’Europe. Tout cela n’est pas acceptable. Il faut vraiment faire un effort considérable pour libérer les instances internationales, qui doivent être des instances publiques, de l’emprise d’acteurs financiers privés qui, au moyen de leur argent, influencent durablement. Il ne faut pas être naïf, si vous donnez des millions de dollars à une organisation, ou des dizaines de millions de dollars, vous avez forcément une influence sur son agenda. C’est un phénomène majeur.
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L’Open Society et la fondation Microsoft sont les principaux financeurs privés du Conseil de l’Europe.
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Ce phénomène s’observe, nous l’avons montré, à la CEDH. Maintenant il faut que la Cour retrouve son indépendance. On nous dira qu’il est difficile en dehors des cas de conflits d’intérêts d’identifier vraiment l’influence de ces ONG. Mais il y a un effet d’osmose et de mimétisme. C’est un milieu. Lorsqu’il se trouve au sein de 47 juges, 7, 8, 9 ou 10 juges qui viennent d’une même origine, des mêmes milieux, ils exercent une influence sur l’ensemble.
VA Plus : Vous m’aviez dit l’année dernière que si vous-même participez à ce système à la CEDH avec votre ONG, que vous intervenez dans ces affaires, c’est parce que vous estimez que l’existence de cette Cour en elle-même est légitime, parfois elle est nécessaire, et que c’est son fonctionnement qui est vicié par cette situation. Que proposez-vous comme solution dans le cas de la CEDH ? Comment faire pour que cette cour refonctionne normalement et se libère de ce carcan idéologique ?
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Je défends l’existence de ces instances internationales.
Mais il faut les libérer de l’influence privée
qui est devenue massive.
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Gregor Puppinck : Je pense en effet que les instances internationales ne sont pas mauvaises en soi, le Conseil de l’Europe, la CEDH, les Nations Unies ne sont pas mauvais en soi et même nous sommes très contents parfois d’y avoir recours et de gagner à la CEDH même contre la France – ça nous est arrivé – pour des causes justes. Donc en soi je tiens à le dire, je défends le système, l’existence de ces instances. Mais il faut les libérer de l’influence privée qui est devenue massive. Et donc on le fait déjà en publiant ce rapport et d’autres peut-être aussi prochainement.
Ensuite il y a des règles à appliquer. Déjà la CEDH devrait respecter les règles qu’elle impose aux juridictions nationales. Ce sont des questions de procédure interne. Mais il y a des règles sur la transparence, des règles sur le dépens des juges qui devraient être appliquées ; une obligation pour les ONG de se déclarer lorsqu’elles interviennent dans une affaire ou lorsqu’elles sont derrière une affaire. Un certain nombre de choses à mettre en place qui sont assez simples. J’espère que la Cour le fera. J’espère aussi que des parlementaires de l’assemblée du Conseil de l’Europe vont le recommander à la Cour.
Donc oui il y a des choses qui peuvent être faites. La première chose à faire c’est d’ouvrir les yeux sur le système de gouvernance supranationale dans lequel nous évoluons et qui effectivement est très loin, très éloigné de la démocratie nationale.